Cette semaine, après un cours de français donné dans le quartier de Shibuya, j'ai trouvé dans une librairie une édition récente de la bande dessinée japonaise
Akira. C''est l'un des manga les plus connus hors du Japon, principalement parce qu'il a un format qui s'approche de ce qui se fait en Occident.
Au Japon, un manga est un produit "consommable". Une histoire suit généralement le schéma suivant : elle est publiée par épisodes dans un magazine de manga, si elle a du succès dans ce magazine elle parait sous-forme de petits livrets de la taille d'un livre de poche regroupant plusieurs épisodes. Le dessin, quant à lui, est en noir et blanc, très simple mais suffisant pour montrer avec précision les expressions de visage. Il est en outre très dynamique, plusieurs vignettes sont généralement nécessaires pour décrire une action. Ce dernier détail explique pourquoi les manga sont si épais pour un temps de lecture qui est le même.
On a donc d'un côté le manga japonais, au dessin monochrome très simple et très dynamique, dans un petit format qu'on lit dans le train en commutant ou dans un café, et de l'autre côté la BD européenne, d'un grand format, avec de longue bulles sur des images qui sont presque des tableaux. (Je parle de la BD pour adultes, comme celle d'Enki Bilal - pas de la BD belge grand public.) D'un côté le manga japonais qu'on lit et qu'oublie vite pour passer à un autre, et de l'autre la BD européenne qui s'apprécie comme un bel objet, et qui se lit tranquillement chez soi en prenant son temps.
Pour finir, il reste un détail de mise en page : bien que récemment certaines publications adoptent une mise en page à l'occidentale, écrivant horizontalement et de gauche à droite, le japonais s'écrit traditionnellement verticalement, de haut en bas et de droite à gauche. Les manga sont écrits de façon traditionnelle, par conséquent un manga se lit de droite à gauche et l'ordre des vignettes est inversé par rapport aux publications européennes. De plus en plus de manga sont publiés dans leur version française en gardant le sens original de lecture.
Entre les deux, Akira est assez particulier ; c'est à ma connaissance le seul manga vendu au Japon dans un grand format. De plus, étant un des premiers manga à se vendre hors du Japon, sa version d'exportation a été adaptée : les vignettes sont colorisées et un effet de miroir a été appliqué aux planches pour les passer dans le sens de lecture occidental.
Revenons-en à cette nouvelle édition ; Akira dans sa version japonaise était en noir et blanc. Dans sa version d'export en couleur. Les Européens et les Américains seraient donc mieux lotis que les Japonais ? Plus maintenant ! L'édition qui vient de sortir est une édition... Japonaise, basée sur la version colorisée pour l'export. En parallèle, la vieille édition en noir et blanc ressort a un prix réduit, 1000 yen l'exemplaire (ce qui reste cher comparé à un manga petit format). Il est donc en japonais, mais se lit de gauche à droite, et le texte est écrit horizontalement !
Si vous aimez la BD européenne mais que vous n'aimez les manga, que vous les trouvez trop baclés, et que vous n'avez toujours pas lu Akira, c''est le manga idéal pour découvrir le style du dessin japonais dans un beau livre, grand format, avec des couleurs aussi travaillées que dans les BD européennes.