29 août 2005

Maîtriser le Sudoku

Depuis quelque temps, je suis accro à un jeu de logique : le sudoku. Je sais, pour quelqu'un qui habite au Japon c'est pas très glorieux de découvrir ça une fois que ça s'est bien répandu dans le monde entier. Mais je rattrape mon retard !

Pour ceux qui ne connaissent pas, il s'agit d'une grille de régions de 3×3 formant une grille 9×9. Il s'agit de placer dans chaque région, chaque ligne et chaque colonne les chiffres de 1 à 9, une seule fois chacun. Pour plus de détails, regardez le lien au-dessus. Si vous voulez vous amuser un peu, essayez un générateur de grilles. Je vous conseille d'imprimer la page, c'est bien plus agréable.

Après avoir resolu plusieurs dizaines de lignes, le processus de résolution devient assez répétitif (mais on ne s'en lasse pas). Les règles de résolution logique que j'utilise se comptent sur les doigts d'une main, et je ne pense pas qu'il y en aie d'autres - a part dérouler l'arbre des possibilités. J'ai donc décidé de programmer un générateur de grilles. Il y en a bien sûr déjà beaucoup sur le web, mais c'était pour comprendre un peu le fonctionnement.

Il y a une façon simple de créer des grilles, en utilisant un solveur logiciel. On part d'une grille blanche, puis on ajoute récursivement des chiffres aléatoirement. À chaque insertion, le solveur vérifie qu'il y a une unique solution. S'il n'y a pas de solution, il fautrevenir en arrière. S'il y en a plusieurs, il faut continuer à ajouter des chiffres. Ça donne une grille assez mauvaise (c'est-à-dire pas très intéressante à résoudre) mais ce sera un début. Plus tard il faudra implémenter un algorithme plus proche de la création à la main, mais c'est un challenge ; les programmes actuels ne produisent pas de résultat aussi bon que ce qui est fait à la main.
J'ai donc commencé à écrire mon solveur. Afin de s'assurer que les grilles sont solvables par des règles logiques, j'ai implémenté un solveur se basant sur des règles logiques, comme un humain. Bien sûr dérouler l'arbre des possibilités est plus facile, mais je préfère reporter ça au plus tard pour éviter au joueur humain d'y avoir recours lui aussi.

Pour le moment, j'ai juste implémenté deux règles :
  • Élimination : pour une case donnée, on regarde les « voisins » (même ligne, même colonne ou même région). S'il ne reste qu'une possibilité, la valeur de lacase est déterminée.
  • Remplissage : pour une région (ou ligne, ou colonne) donnée, on regarde les chiffres manquants. S'il n'y a qu'une case dans laquelle un nombre donné ne peut entrer, alors la valeur de la case est déterminée.
Maintenant je suis un peu embêté. Les autres règles que j'applique sont plus compliqués à mettre sous forme d'algorithme, car elle se basent sur des déductions intermédiaires genre « Il y a un trois dans l'une de ces deux cases ». Je crois qu'au moins dans un premier temps je vais quand même dérouler l'arbre des possibilités, mais me limiter à un ou deux niveaux pour que ça reste humainement possible. J'essayerai ensuite de résoudre les grilles ainsi générées.

En attendant le générateur, je vous livre le sudoku qui m'a donné le plus de mal jusqu'ici. Il est issu d'un livre japonais qui s'appelle tout simplement Sudoku 3, aux éditions Nikoli. L'auteur est Kunpei Aizawa (désolé pour le piratage, je ne le referai plus).

J'y ai passé largement plus d'une heure. Imprimez-le, essayez de le faire et donnez vos temps en commentaire !



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26 août 2005

L'An 01

Récement, j'ai lu une bande dessinée soixante-huitarde très interessante : L'An 01. Sérieusement, ça vaut la peine d'être lu. En résumé, l'auteur dénonce la folie du monde moderne, le travail à la chaîne, le besoin de possession, et propose comme solution de « tout arrêter ».

Gébé, l'auteur, est mort l'année dernière. Je ne sais pas ce qu'il pensait des années 2000, elles sont en tout cas bien éloignées de l'anarchie utopiste de l'an 01 qu'il décrit : pas de police, pas de justice, les hommes et les femmes travaillent 5% du temps pour cultiver la terre pendant que les autres jouent et étudient... Aujourd'hui, le capitalisme devient de plus en plus sauvage, la publicité de plus en plus présente et le mot d'ordre « consommez » est plus présent que jamais. Personne ne se balade tout nu sous sa « pelure ». (Sauf au Japon. Mais je ne sais pas s'ils sont tout nus dessous ou pas.)

Mais la liberté est là, si vous savez la prendre. Pas besoin de faire la révolution tous ensemble, de forcer les autres à suivre votre voie. Si vous ne voulez pas vivre dans une tour et vous entasser dans le métro tous les jours, vous pouvez allez vous installer au fin fond de la campagne, à cultiver la terre pour vous nourrir et vous éclairer à la bougie. Si vous préférez fabriquer vos propres langues de chat plutôt que de les acheter à Belin, faites le.

Si, comme les groupes d'avant l'an 01 vous voulez travailler peu pour gagner moins vous pouvez vous inscrire à une agence d'intérimaire (au Japon il y a même un nom pour ça, « freeter »). Si vous avez fait un minimum d'études et que votre métier ne vous plait pas, il est toujours temps de changer. Et si vous souhaitez que la consommation baisse, contentez-vous de baisser la votre.

Fabriquez votre propre bonheur avec les personnes que vous aimez. N'essayez pas de changer le monde, mais laissez pas le monde vous changer.

25 août 2005

Google et la Messagerie Instantanée

D'habite, j'évite de relayer les infos « trop populaires », d'ajouter ma voix au cafarnaüm pour au final n'apporter aucune information supplémentaire. Mais cette fois, je ne peux pas m'empêcher de parler de Google Talk, le service de messagerie instantanée et de téléphonie IP par Google.

Un petit résumé de ma vision des choses :

À première vue, l'interface est propre et belle mais rien de bien nouveau. « Juste » un clone de Skype, qui ne fonctionne que sous Windows.

Le point positif, c'est que c'est basé sur un protocole ouvert (Jabber, XMPP). Ça peut vous paraître du charabia, mais concrètement ça veut dire qu'on pourra communiquer avec d'autres services. Vous imaginez un monde où les utilisateurs d'hotmail ne peuvent pas envoyer d'email aux utilisateurs de Yahoo ? C'est comme ça que ça se passe avec les messageries propriétaires (MSN Messenger, AIM, Y!Messenger), et c'est une volonté délibérée des boîtes qui sont derrière. Ça veut dire aussi qu'on peut déjà utiliser le logiciel qu'on aime pour se connecter à Google Talk (psi, gossip, gajim...)
Le petit bémol, c'est que pour le moment le serveur de Google ne communique avec aucun autre. L'interopérabilité est donc encore théorique, d'autant plus que de l'aveu de l'un des développeurs le code de communication serveur-serveur n'est pas encore implémenté. Visiblement, Google cherche à limiter le spam et instorer un « réseau de confiance » entre serveurs XMPP ayant des règles de sécurité strictes pour éviter le spam. La plupart des serveurs Jabber publiques permettent de créer un compte automatiquement.

La conclusion, c'est que vous pouvez essayer Google Talk, mais ne vous attendez pas à un miracle. C'est simple, ça marche... Mais c'est tout. Dans la pratique ça n'apporte rien par rapport aux concurrents. Par contre, attendez de voir les réactions dans les mois qui suivent. Si les solutions interopérables avec Google Talk se multiplient, les utilisateurs de MSN pourraient bien se trouver isolés face à la fédération de serveurs ouverts qui va apparaître.

PS : je ne suis pas toujours en ligne (pas souvent) mais ceux qui me connaissent connaissent aussi mon adresse gmail et peuvent essayer de me joindre.

17 août 2005

Cours de maths dans le train

Ce midi, j'étais assis dans le train entouré par quatre collégiennes. Elles regardaient un problème de mathématiques affiché en hauteur, dans le train. En effet, dans les trains japonais il y a souvent parmi les publicités des problèmes affichés. Ils sont là en guise de publicité pour des journaux, des écoles... Le niveau varie entre maternelle (oui, il y a des examens d'entrée en maternelle) et le collège, voire le lycée.

Comme je les entendait discuter du problème (« Ouh là, c'est difficile... Je ne vois pas du tout... Et toi ? Pourtant c'est écrit que c'est de notre niveau. ») j'ai levé la tête. Le problème ressemblait grosso-modo à ça :

Avec trois bouts de bois de longueurs différentes, on peut former un triangle comme ceci :


Yukiko, Reiko, Yuko et Tokiko ont chacune préparé des bouts de bois en cassant des baguettes.
  • Yukiko : 10 cm, 5 cm et 3 cm
  • Reiko : 9 cm, 6 cm et 4 cm
  • Yuko : 11 cm, 7 cm et 5 cm
  • Tokiko : 10 cm, 6 cm et 5 cm
L'une d'entre elle ne peut pas réussir à faire de triangle. Laquelle ?


Face à ce problème, les collégiennes étaient bien perplexes. Elles s'accordaient à dire que c'était Reiko qui n'arriverait pas à former son triangle, mais sans vraiment savoir pourquoi.

Je me suis dit que je n'allais pas laisser les pauvres collégiennes dans leur ignorance. J'entrepris donc de leur expliquer simplement l'inégalité triangulaire, qu'on apprend (en France du moins, si ma mémoire est bonne) dans la première année de collège. « Dans un triangle, la somme des longueurs deux côtés les plus courts est toujours supérieure au côté le plus long. Sinon, ça ne marche pas. Donc c'est Yukiko qui ne peut pas former son triangle », disais-je en mimant le triangle-qui-marche-pas avec mes mains.

Elles m'ont regardé comme un paysan qui aurait vu son cheval se mettre à parler. Puis, elles ont éclaté de rire. Le hasard voulant qu'elles soient arrivées à leur gare juste à ce moment-là, elles sont sorties du train en courant, riant très fort et criant « Sugoi ! sugoi ! sugoi !(*) »

Bon, je sais bien qu'à Tokyo ce n'est pas courant d'adresser la parole aux inconnus, et je veux bien croire que malgré le nombre croissant de gaijins à Tokyo elles n'en aient pas vus beaucoup. Mais ce n'est pas une raison pour se barrer en courant sans dire merci.


(*) « C'est énorme ! »

La revolution n'aura pas lieu

Je parlais récement de politique japonaise, de dissolution. Parmi les rebelles du Jiminto la plupart jouent profil bas, en se presentant aux prochaines élections comme candidats indépendants pour probablement essayer de retrouver les faveurs du grand parti après la tempête.

KokuminshutoUn nouveau parti a bien été créé, il s'agit du Kokuminshinto ("Le Nouveau Parti Populaire") par les leaders rebelles Watanuki et Kamei. Au total, ils sont... Cinq. 5 hommes politiques qui quittent le parti, c'est quelque chose de courant ; on est loin d'une dissolution du Jiminto.

Reste à savoir quel sera l'issue de l'élection du 11 septembre. Il y a plusieurs possibilités : victoire du Jiminto, victoire du Minshuto, le principal parti d'opposition. On assistera peut-être à de nouvelles alliances, par exemple le Kokuminshinto avec le Minshuto.

Le Kokuminshinto est fait de vieux politiciens qui ont été incapables d'expliquer clairement pourquoi ils s'opposaient à leur parti (le coup du « je m'inquiète pour les petits villages de montagnes » n'a pas marché auprès de l'opinion publique) donc ils risquent fort de ne pas ramasser beaucoup de sièges.

Katsuya OkadaLe Minshuto bénéficie d'une popularité croissante, mais son leader actuel, Katsuya Okada, a le charisme de François Hollande avec le côté « trop sérieux » de Lionel Jospin. À un sondage récent, moins de 10 pourcent des japonais souhaitait le voir Premier Ministre à l'issue des élections. Surtout, le Minshuto a tardé avant de faire une contre-proposition pour la réforme de la poste : ils l'ont faite une fois que la dissolution a été annoncée. Je pense que le Minshuto prendra le pouvoir un jour, mais ce ne sera pas forcément pour cette fois.

Le Jiminto est le defender de la course, et la fuite de quelques membres vers le Kokuminshinto ne devrait pas trop l'affecter. Suite à l'annonce du nouveau parti, le Premier Ministre Koizumi a déclaré : « Je suis très content de la formation de ce nouveau parti. S'ils ne sont pas d'accord avec la ligne du Jiminto, il est normal qu'ils s'en aillent. » À noter quand même que Koizumi a beaucoup de travail ces temps-ci. Il fait un recrutement très actif pour presenter un candidat contre chacun des 30 « rebelles » au projet de loi de réforme de la Poste Japonaise. Ses recrues sont diverses, parfois insolites. Parmi elles, il y a le fameux Horiemon qui fera face à Kamei - un leader du Kokuminshinto - à Hiroshima.

Takafumi Horie, dit Horiemon, est un homme d'affaire à l'esprit « start-up ». C'est le pdg de livedoor, un portail internet. Il est connu pour sa tenue vestimentaire décontractée, ses annonces fracassantes (« J'achète Fuji TV ! ») et ses coups de pieds dans la fourmillière de l'industrie japonaise. En deux mots, c'est une grande gueule. On se demande bien se que ça peut donner comme homme politique.

Mise à jour : Finalement, Koizumi a demandé à Horiemon de quitter le monde des affaires pour la politique. Pour lui pas question, il tient à garder la tête de Livedoor. Il ne sera donc pas candidat Jiminto. Par contre, il se présente quand même ! C'est bien du Horiemon, ça. il n'y aura probablement pas de candidat du Jiminto à Hiroshima. Un point positif pour Kamei.

10 août 2005

Hiroshima

Fin juillet, j'ai visité Hiroshima. Le hasard fit que ce soit quelques jours avant la célébration des 60 ans de la bombe qui a détruit la ville. J'ai bien sûr visité le musée de la bombe atomique, proche du lieu ou la bombe est tombée sur la ville.

La première partie est informative, sur Hiroshima avant la bombe, sur les dégats causés aux bâtiments et sur l'arme atomique en général. On ne se sent d'ailleurs pas très fier d'être français, car après les États-Unis, la Russie et la Chine, c'est la France qui dispose du plus grand nombre de têtes nucléaires au monde. On apprend pourquoi les États-Unis ont utilisé l'arme atomique contre le Japon alors que l'issue de la guerre était connue, et pourquoi ils ont choisi Hiroshima comme cible. La deuxième partie porte sur les conséquences de la bombe sur les êtres humains, et la visite est une expérience terrifiante que personne n'aimerait faire deux fois.

Il ne faut pas oublier l'horreur de la bombe atomique ; ceci dit, il faut garder à l'esprit que Hiroshima a été reconstruite très rapidement. C'est aujourd'hui une jolie ville portuaire où l'on circule en tramway, qui a l'air bien agréable à vivre. On peut prendre le bac vers la petite île de Miyajima où se trouve un temple au dessus de la mer, et une montagne peuplée de singes et de cerfs en liberté mais pas peureux. On peut aussi y manger les délicieux Momiji Manju, de petits gâteaux en forme de feuille d'érable.

Je sais que ce ne sera pas facile si vous n'y êtes jamais allé, mais la prochaine fois qu'un japonais vous dit qu'il est originaire de Hiroshima... Pensez à une jolie petite ville portuaire entourée de montagne, avant d'imaginer un champignon atomique.

08 août 2005

Politique : Koizumi a dissout

Cela fait bien longtemps que je n'ai pas écrit ici, j'ai en effet été assez occupe ces derniers temps. J'ai en particulier visité Hiroshima et Kyoto, j'aurais à ce propos quelques anecdotes à raconter.

Une fois n'est pas coutume, je vais parler de politique. En effet, ce 8 août marque peut-être un tournant dans l'histoire de la politique japonaise.

Junichiro KoizumiLorsque que l'actuel premier ministre, M. Koizumi - dont la crinière n'a rien à envier à celle de M. de Villepin -, a pris ses fonctions il y a à peu près quatre ans, il était l'homme des réformes. Il avait en particulier l'intention de privatiser la poste japonaise, qui grâce à l'épargne des japonais est l'établissement bancaire que dispose de la plus grosse somme d'argent au monde. Cependant, au cours de son mandat les réformes se faisaient attendre et le premier ministre faisait plus parler de lui par ses visites controversées au sanctuaire de Yasukuni que par ses réformes effectives... Jusqu'à maintenant.

Depuis quelques mois, le premier ministre prepare sa reforme de la poste pour que au moins la partie bancaire soit privatisée. Son projet de loi étant passé de justesse a l'Assemblée, il a été soumis au vote du Sénat. Après de nombreuses polémiques au sein de la classe politique, le texte a été rejeté à cause de dissidents au sein du parti de la majorité (le Jiminto). En réponse à ce vote, et conformément a ce qu'il avait dit, le Premier Ministre a annoncé dans la journée la dissolution de la Chambre des députés.

Voici ce que disent les journaux français, soucieux d'être concis pour un sujet si loin des préoccupations de leurs lecteurs. En réalité, cette décision n'est pas aussi stupide que la dissolution de Chirac en 1997 et est une grande preuve de courage de la part de l'actuel Premier Ministre. C'est presque un sacrifice conscient de sa carrière pour que les changements nécessaires aient lieu au Japon.

Politique du Japon

Avant de continuer, un petit tour d'horizon de la politique japonaise s'impose. Il y a trois partis importants au Japon :
  • Le Parti Libéral-Démocrate (Jiminto) a toujours été le parti dominant. Pour cette raison, il inclut differents mouvements, qui ne sont pas toujours forcément d'accord les uns avec les autres. Sa taille fait qu'il n'y aie pas forcément de direction politique bien claire :la plupart des politiciens y entrent puis essaye de le faire aller dans la direction qu'il préconise.
  • Le Komeito est la branche politique de la secte Soka-Gakkai. C'est un petit parti, mais le Jiminto a depuis peu besoin de son alliance pour conserver la majorité absolue.
  • Le Parti Social-Démocrate (Minshuto) est un parti de gauche, le principal parti d'opposition. Son influence est grandissante, mais il reste minoritaire face à l'alliance Jiminto-Komeito.
Koizumi est du Jiminto. Avant de devenir Premier Ministre, ainsi que quand il a pris ses fonctions, il a toujours affirmé vouloir privatiser la poste. Ayant la majorité avec lui, son projet de réforme aurait du passer comme une lettre à la poste (c'est le cas de le dire), n'est-ce pas ? Ce n'est pourtant pas ce qui s'est passé. Plusieurs cadres du Jiminto, en particulier le sénateur Kameï, ont appelé à voter contre le projet de réforme. Au final, 22 sénateurs du Jiminto ont voté contre, et le projet de loi a été rejeté. L'argument : si la poste est privatisée, les petits villages de campagne n'auront plus de bureau de poste. C'est louable.

À travers le miroir

Shizuka KameïImaginez le tableau : des politiciens d'un parti de droite, parmi les plus puissants (imaginez Francis Mer, ou Nicolas Sarkozy), se battent corps et âme contre la privatisation d'une instance publique pour protéger les petits villages. Pour cela, il vont jusqu'à s'opposer à la direction de leur parti, même si certains d'entre y étaient promis à un brillant avenir (premier ministre). Je vous assure que c'est très amusant de les voire se prêter à un tel exercice.

En fait, l'envers du tableau est bien différent. Je vous avait dit que la poste japonaise était l'institution bancaire qui disposait du plus de liquidités au monde. Cette instution bancaire appartenant à l'État, celui-ci ne se gêne pas pour se fournir des prêts en utilisant l'épargne des japonais. Cet argent sert à diverses choses, comme par exemple construire des autoroutes inutilisées au fin fond de la campagne, avec un pot de vin à la clef. Au final, l'État japonais est surendetté.

Koizumi veut mettre fin à ce système, l'État ne doit plus se servir littéralement dans les comptes de la poste. Pour cela, la seule solution est de se séparer de la poste. La privatiser pour mieux la protéger des politiciens peu scrupuleux. Forcément, ceux qui avaient l'habitude de profiter du système veulent défendre ce qu'on appellerait en France leurs "acquis sociaux". Et pour cela, le seul argument valable... C'est la protection des campagnes.

C'est pour cela que Koizumi a prononcé la dissolution. Pour que les politiciens vérreux ne soient pas réélus et que la réforme puisse passer. Il a ajouté autre chose : les dissidents ne pourront pas utiliser le nom du parti lors des élections, et Koizumi présentera un candidat du parti contre eux.

Dissolution du Jiminto ?

Cette décision est risquée. D'une part, le peuple japonais n'etait à priori pas pour une privatisation de la poste. Le fait que la poste soit publique est pour eux un gage du sécurité pour leur épargne. On ne sait pas si "japonais moyen" va bien comprendre le problème de magouilles qui se pose tant que la poste est publique. D'autre part, le Jiminto va être affaibli à coup sûr. Il se pourrait que le Minshuto prenne la majorité des sièges. Pour finir, le gouvernement Koizumi est dissout avec l'Assemblée et Koizumi est loin d'être sûr de garder sa place.

Une autre question se pose, c'est celle de la scission du Jiminto en plusieurs partis. Curieusement, les cadres "dissidents" ont affirmé leur amour pour le Jiminto et leur voeux que celui-ci reste ce qu'il est. À mon avis, une scission pourrait au contraire permettre de sortir les débats du Jiminto (une politique mono-partite n'a jamais été très démocratique) afin de les remmettre entre les mains des japonais.

Nos amis japonais voteront donc le 11 septembre prochain ! Alors, quatre ans apres le World Trade Center, est-ce qu'on va assister à l'explosion du Jiminto ?